Le 7 juin 2020, une manifestation Black Lives Matter rassemble plus de 10 000 personnes à Bruxelles. Faisant largement écho au meurtre de George Floyd par des policiers à Minneapolis (États-Unis), les manifestantes et manifestants réclament entre autres des autorités publiques qu’elles s’engagent dans une profonde introspection sur la colonisation belge. Dans l’intervalle, de nombreuses statues et monuments coloniaux sont contestés dans l’espace public.
L’espace public est chargé de références à l’histoire et de traces symboliques (fresques, statues, monuments, etc.) qui valorisent notamment la colonisation. Ces représentations établissent des échelles de valeur et des hiérarchies de pouvoir au sein de l’espace public et promeuvent des stéréotypes raciaux. Urban, aux côtés d’autres acteurs publics et de la société civile, œuvre à la mise en place d’un espace public plus inclusif.
Un temps de réflexion
En juillet 2020, le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale (RBC) a adopté une résolution « relative à la décolonisation structurelle et inclusive de l’espace public bruxellois dans le cadre d’un travail de dialogue et de mémoire ».
Entre 2020 et 2021, à l’initiative du Secrétaire d’État de la RBC chargé de l’Urbanisme et du Patrimoine M. Pascal Smet, un groupe de travail a été constitué et chargé d’élaborer des recommandations pour la décolonisation de l’espace public. Il rassemblait des expert·e·s issu·e·s tant du monde académique que de la société civile. Urban a coordonné le processus de travail.
En février 2022, la synthèse des travaux a été communiquée au Parlement bruxellois et a été publiée sous forme d’un rapport.
La même année, les Heritage Days/ Journées du Patrimoine consacrés à la thématique des traces coloniales ont sensibilisé le public au sujet.
Le temps de l'action
En mai 2023, un plan d’action "Vers la décolonisation de l’espace public en Région de Bruxelles-Capitale" a été rédigé et validé par le gouvernement de la RBC sur base des recommandations exprimées dans le rapport 2022 (Plan d’action 2023).
En 2024 et 2025, Urban est chargée de piloter sa réalisation en collaboration avec une série d’institutions et administrations partenaires. Un comité d’accompagnement se réunit régulièrement pour veiller à la mise en œuvre du plan et un coordinateur a été nommé au printemps 2024 pour assurer le suivi quotidien.
Le plan d’action comporte quatorze actions à réaliser; treize d’entre elles sont directement coordonnées par Urban. L’entièreté du plan correspond par ailleurs à l’action 36 du Plan bruxellois de lutte contre le racisme 2023-2026.
Une mise en débat et un processus participatif
Le 21 mars 2024, l’installation "The Grand Opening" a été inaugurée à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale. Cette initiative amorce une période de mise en débat du passé colonial autour du Monument aux pionniers belges du Congo situé dans le parc du Cinquantenaire. Cette installation restera en place durant une année et l’opportunité est offerte à plusieurs artistes de s’y exprimer régulièrement.
La programmation comprend des interventions performatives, littéraires et actives pour réfléchir ensemble à l’héritage colonial belge, à ses répercussions sur nos expériences et nos identités.
Qu’entend-on par la « décolonisation de l’espace public » ?
La décolonisation de l’espace public fait partie intégrante de la décolonisation de la société, Cette dernière nécessite un processus social, politique et culturel continu qui ne se limite pas au passé colonial de la Belgique, mais qui s’inscrit également dans d’autres domaines, tels que la santé, le logement, l’éducation et l’emploi. En d’autres termes, il s’agit de construire une Région de Bruxelles-Capitale inclusive, dans laquelle chaque Bruxelloise et Bruxellois se reconnaît et se sent reconnu.
L’enjeu de la décolonisation consiste à « combiner une révision de la représentation officielle de la mémoire coloniale dans l’espace public avec la diffusion de connaissances sur l’histoire coloniale et une réflexion sur ses conséquences persistantes et actuelles en Belgique et dans les pays de l’ancienne Afrique belge ». (Rapport 2022, p. 218).
Pour y parvenir, une prise de conscience est nécessaire : « les mémoriaux et monuments intentionnels ne manifestent pas l’Histoire, mais tout au plus l’histoire de qui ou de quoi on a estimé, pendant une période donnée, qu’il était digne de le commémorer dans l’espace public – un jugement qui souvent ne correspond plus à ce que nous jugeons mémorable dans la société actuelle » (Rapport 2022, p. 58).
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